Jeremy Brett, de son vrai nom Peter Huggins, est né en Angleterre le 3 novembre 1933 à Berkswell, près de Coventry, dans le pays de Shakespeare, le Warwickshire.

C’est en voyant Laurence Olivier au Cameo Cinema, sur Berkswell Road, notamment dans Les Hauts de Hurlevent qu’il décide de devenir acteur ; ceci contre l’avis de son père, un officier de l’armée de sa Majesté aux stricts principes, le Lieutenant-colonel Henry William Huggins. Malgré une dyslexie et un problème d’élocution, il réussit, à force de travail, à surmonter son handicap et à devenir un jeune premier remarqué.

Après des études à Eton, il entra à la Central School of Speech and Drama, puis fit ses débuts au Library theatre de Manchester (1954-55) avant d’entrer au Old Vic Theatre de Londres en 1956 (il fera, avec la troupe, une tournée aux Etats-Unis, au Winter Garden de New-York, l’année suivante).

Après une série de succès tels que Meet me by the Moonlight (1957), The Edwardians (1959), The Kitchen (1961) et surtout Hamlet (1961), où le rôle titre lui valut l’unanimité de la critique - et une réconciliation avec son père… - il entra dans la troupe de Laurence Olivier, la National Theatre Company, en 1963. Il joua, entre autres, avec Anthony Hopkins, Sir Derek Jacobi, Joan Plowright… On peut également citer de cette période au National Theatre la pièce de Henrick Ibsen Hedda Gabler, sous la direction d’Igmar Bergman, avec Robert Stephen et Maggie Smith (Cambridge Theatre, Londres, 1970).

Il partagea l’affiche avec Alec Guiness dans la pièce de John Mortimer A voyage ‘Round My Father (Theatre Royal, Haymaket, Londres, 1971) et avec Vanessa Redgrave dans la pièce de Noel Coward Design For Living (Phoenix Theatre, Londres, 1973). 

Brett eut également beaucoup de succès Outre-Atlantique ; on peut citer, par exemple, les rôles de Dracula, dans la pièce du même nom (Ahmanson theatre, Los Angeles, 1978), de John Watson dans The Crucifer of Blood (en 1980, dans le même théâtre, avec Charlton Heston dans le rôle de Sherlock Holmes) ou celui de William Tatham, aux côtés de Rex Harrison et Claudette Colbert, dans Aren’t We All (Brooks Atkinson theatre, New-York, 1985).

Sa carrière télévisuelle fut également très abondante : son interprétation de Dorian dans Le portrait de Dorian Gray en 1963, de Bassiano, aux cotés de Sir Laurence Olivier, dans Le Marchand de Venise en 1970 et surtout de Max de Winter dans l’adaptation de 1978 du roman de Daphné du Maurier Rebecca (qui éclipsa même, selon la majorité des critiques, celle de Laurence Olivier dans le film d’Hitchcock de 1940) contribuèrent à sa réputation.

Son Macbeth (pièce filmée en 1982 et dont la vidéo est utilisée dans les écoles américaines et anglaises) est d’un naturel très rare.

Mais c’est pour son rôle de Sherlock Holmes dans la série produite par Granada TV (1984-1994) qu’il reste le plus connu et le plus admiré, surtout en France. Grâce à sa formidable maîtrise de la technique de jeu mise au point par Stanislavski, Brett a réussi le tour de force de redonner au personnage de Holmes toute sa complexité et son relief. Il a fait du détective un personnage vivant et complet, très fidèle aux écrits de son créateur, Sir Arthur Conan Doyle, là où les autres acteurs se sont arrêtés à une partie seulement du caractère.

On regrette d’autant plus que le cinéma ne lui ait pas donné plus de chance. On peut citer, tout de même, les rôles de Nicholaï dans War and Peace (1956), Mullen dans The Wild and The Willing (1963) mais aussi l’inquiétant Tony Vernon Smith dans Mad Dogs And Englishmen (1994), personnage complexe qu’il joua avec brio.

De graves problèmes cardiaques ralentirent sa carrière dès le début des années 90 et il décéda chez lui le 12 septembre 1995. 

Contrairement à sa vie professionnelle, la vie privée de Jeremy Brett fût marquée par deux drames. Tout d’abord la mort de sa mère (une des héritières Cadbury) dans un accident de voiture alors qu’il avait 25 ans. Ensuite, la perte de sa deuxième femme. Divorcé de l’actrice Anna Massey, avec qui il eut un fils, David, en 1958, il se remarie en 1978 avec la productrice américaine Joan Wilson. Pour elle, il décide de vivre à Boston, sa ville natale. Mais huit ans plus tard, Joan décède d’un cancer, il perd alors sa complice et a beaucoup de mal à faire face, même si sa foi en la vie et l’amour de son métier l’empêchent de sombrer.

Jeremy Brett est à l’origine, avec Linda Pritchard, sa dernière compagne, de la Fondation Jeremy Brett Pour la Recherche Contre le Cancer.

Il manqua à Jeremy Brett trois choses pour atteindre à une célébrité que son talent et son professionnalisme lui permettaient d’espérer :

- La reconnaissance internationale du grand public, qui ne peut se faire que par le biais du cinéma.

- Le passage à la mise en scène, qui souvent permet aux acteurs de se faire remarquer et respecter par leur pairs – comme si jouer, et jouer avec talent, ne suffisait pas à prouver son intelligence.

-  La longévité ; chose dont le public a souvent besoin chez un acteur pour réaliser à quel point il est grand...